dimanche 8 janvier 2017

97- Naturel vs synthétique -1- L'idée

NATUREL VS SYNTHÉTIQUE – L’IDÉE


Pour bien démarrer l'année, je vais lancer une nouvelle série, potentiellement bien polémique. Mais avant d'entrer dans les sujets que j'ai en tête, il convient de préciser l'idée de cette série.

Je n'ai pas l'intention d'attaquer l'agriculture biologique en tant que telle, mais plutôt de m'attaquer à certaines idées reçues, largement diffusées par la communication dite, ou non dite, faite par des personnalités, lobbies et groupements économiques qui tirent leurs profits (parfois copieux) de la vente de conseils, d’articles, de conférences, de formations, de séminaires ou simplement de produits bio.
Ils sèment volontairement le doute dans l'esprit des consommateurs dans le seul but de provoquer un changement dans leurs habitudes de consommation, afin de pouvoir dégager des profits toujours plus importants.
Tous les moyens sont bons, articles de journaux, émissions de télévision, rencontres avec des journalistes, affiches, campagnes de publicité, actions sur les marchés, lobbying auprès des autorités politiques, réseaux sociaux, utilisant largement le mensonge, la contre-vérité, la manipulation des chiffres, des statistiques ou des images, pour faire avancer leurs idées.

Image: http://www.agrimaroc.ma/wp-content/uploads/agricultre_bio.jpg

Je doute largement de la volonté philosophique qu’ils ont de faire changer les mentalités.
Je suis persuadé que l’objectif se situe dans deux lignes parallèles, économique d’une part, d’enrichissement pur et dur, et de pouvoir d’autre part, par la mainmise qu’ils arrivent à obtenir sur de nombreux décideurs, politiques et économiques, grâce à leurs actions.

J'ai beaucoup de respect pour les agriculteurs biologiques qui doivent produire avec des moyens très limités. Ils affrontent les mêmes problèmes que les agriculteurs conventionnels, mais doivent les résoudre avec des moyens et des techniques parfois illusoires, et doivent supporter des pertes de production parfois importantes.
Dans certains cas graves, le fait de faire appel à une solution de synthèse pour résoudre une situation désespérée, leur fait perdre leur certification bio, et les marchés qu’elle leur permet d’atteindre (http://www.arboriculture-fruitiere.com/content/perdre-ou-ne-pas-perdre-son-label-bio).  
Ça démontre, d’une part que le bio n’a pas de solutions pour toutes les situations, et d’autre part que faire le choix du bio n’est pas sans risque pour l’agriculteur.
Quelques-uns, les moins nombreux, sont agriculteurs bio par conviction (chose que je respecte, bien que je n’en partage pas la philosophie), d’autres, les plus nombreux, le sont par intérêt économique. Le bio est devenu un marché, très porteur actuellement, et ils ont décidé de faire reposer la stabilité ou le développement de leur entreprise sur ce marché (chose que je respecte également car c’est une parfaite logique d’entreprise).
Mais je suis scandalisé quand un de mes collègues, conseiller en production fruitière en France, me dit que depuis quelques années, la presque totalité des conversions en bio parmi ses adhérents (et d’une manière générale en France, semble-t-il), viennent de personnes qui le font, ni par conviction, ni par choix économique. L’un et l’autre choix seraient parfaitement cohérents.
Non, ils se convertissent au bio parce qu'ils ne supportent plus la pression sociale et familiale autour du sujet des pesticides ou de la pollution des sols, des eaux et de l’air.
Leurs liens familiaux, amicaux et sociaux sont parfois remis en question pour un simple motif de technique de production agricole.
Ils se sentent mis au ban de la société.
Ils ne veulent plus devoir se justifier jour après jour.
Ils en ont assez de devoir défendre leur activité, au risque de devoir supporter des débats orageux ou des confrontations parfois haineuses.

Ils préfèrent abandonner une lutte qu’ils jugent perdue d’avance et se convertir au bio.
C’est la conversion sous la contrainte, comme aux meilleures heures de l’Inquisition ou des pires dictatures.
Vous avez dit Liberté ?


Or il y a beaucoup à dire, sans dénigrer personne, sur la réalité de l'usage des pesticides ou des fertilisants, ou encore sur l'impossibilité d'utiliser les herbicides en agriculture biologique. Car l'agriculture biologique a besoin des pesticides, mais les pesticides autorisés sont choisis exclusivement selon leur origine naturelle, même s’ils sont loin d’être inoffensifs pour la santé ou l’environnement.
Le problème des fertilisants est similaire. L'agriculture biologique en utilise, mais uniquement d'origine naturelle. Bien entendu, ce n'est pas un défaut en soi. C'est cependant un facteur limitant, et ce n'est pas non plus un choix sans risque environnemental ou sanitaire.

On peut d'ailleurs émettre un doute sur la valeur du choix du mot « naturel », puisque la chimie de synthèse n'emploie que des produits naturels pour les transformer, en particulier le pétrole ou l’air.
D’autre part, la chimie n’invente pas grand-chose. Sa principale source d’inspiration est la Nature elle-même. Une grande partie des molécules de synthèse sont des copies de molécules naturelles, ou des évolutions de ces copies.
Au fil des exemples, nous verrons que l’utilisation de la notion de naturel a des hauts et des bas selon les intérêts qu’il faut défendre.

Le débat sur les OGM se situe sur un autre plan, puisque le rejet est purement philosophique, sans réelle justification scientifique. J'ai eu récemment un débat animé sur le sujet, sur une page Facebook d'agriculture biologique. Il faut dire que j'avais eu le culot d'y partager un article défendant les OGM. Je voulais provoquer un débat, pour savoir si les agriculteurs bio ont des arguments autres que les habituels, ceux qui sont utilisés et réutilisés dans les publications et articles partisans. Mais au bout du compte, mon impression est très nettement que le rejet des OGM vient avant tout de l'emploi, dans certains cas abusif, des herbicides.
J’ai déjà eu l’occasion d’écrire, sur ce blog (https://culturagriculture.blogspot.com.es/2015/09/53-ogm-et-pourquoi-pas.html), que les OGM résistants aux herbicides ne sont pas, à mon avis, l’intérêt principal de la technique, et que des orientations nutritionnelles ou environnementales de la recherche seraient bien préférables. J’ai aussi écrit qu’il est fort probable que si la technique s’était développée, dès le départ, non à des fins économiques directes, mais à des fins sanitaires ou environnementales, le rejet actuel n’aurait pas trouvé de base pour se développer.
Donc j'en reviens à cette conclusion personnelle qui est que le rejet ne vient pas du fait que la culture soit OGM, sinon du fait qu'étant OGM résistant au glyphosate, elle permet aux agriculteurs, d'utiliser et d'abuser de l'emploi du glyphosate, avec des conséquences qui mettent en cause le glyphosate, pas l’OGM. C'est très différent. Les arguments sont contre l’herbicide, pas contre la nature OGM de la culture.
Finalement, les nombreux arguments scientifiques en faveur des OGM, n’ont aucun poids face à la manipulation des esprits par des arguments qui mélangent les faits en faisant un amalgame entre la nature OGM de la culture et l’emploi abusif de l’herbicide.
On se situe donc bien sur le terrain de la manipulation et de la croyance.

Image: http://www.pleinchamp.com/var/ca_pleinchamp/storage/images/plein_champ/home/actualites-generales/actualites/stephane-le-foll-peaufine-son-plan-agroecologie/35904779-1-fre-FR/stephane-le-foll-peaufine-son-plan-agroecologie.jpg

Je n'ai donc rien contre l'agriculture biologique en tant que méthode de production. D'ailleurs j'en utilise de nombreuses techniques, puisque je pratique au quotidien la production intégrée, que l'on peut définir brièvement comme une agriculture biologique qui autorise le recours aux produits synthétiques, tant en ce qui concerne  les pesticides, que les herbicides et la fertilisation.
Notons que la notion de production intégrée, peu porteuse et peu parlante pour quiconque n’a pas de lien direct avec l’agriculture, évolue progressivement vers une notion d’agroécologie, qui est à peu près la même chose, mais sous un vocable plus « vendeur ». Nous sommes en plein sur le terrain de la communication.
L’agroécologie élargit cependant le débat, en réunissant sous la même bannière, les différentes formes d’agriculture biologique et la production intégrée, pour leurs efforts communs pour la réduction de l’impact négatif de l’agriculture, et en y intégrant une dimension sociale et culturelle.


Dans cette série, j'ai l'intention de prendre des sujets précis et des exemples, et de mettre en parallèle la solution bio et son équivalent conventionnel, en essayant de comparer, aussi objectivement que possible, les points forts et faibles de chacune, pour mettre en lumière ce qui est du domaine de la réalité, de la science, ce qui est vraiment justifié, et ce qui est du domaine de la croyance.

On y trouvera au bout du compte, une grande incohérence, et surtout une manipulation des esprits des consommateurs due à la grande confusion volontairement entretenue entre la notion de « naturel » et la notion de « bon pour la nature » et de « bon pour la santé ».
C’est ce qui me parait le plus grave, et c’est pour cette raison que je démarre cette série.

Vous savez à l’avance à quelle conclusion je vais arriver, car vous connaissez globalement mon opinion sur ces questions.
Mais ce que vous ne savez pas encore, c’est que les arguments pour défendre mes idées sont nombreux et puissants, et que ces arguments ne viennent, ni du besoin de produire plus, ni d’un problème de rentabilité, ni d’une manipulation par les géants de l’agrochimie.
Nous parlerons surtout d’efficacité, de santé, de pollution, de résidus, d’effets secondaires.

Nous verrons où tout ça nous conduit…

2 commentaires:

  1. Bonjour! Je suis globalement d'accord avec vos propos, sauf pour un élément que je voudrais nuancer. Malheureusement, mon texte semble systématiquement trop long (alors même que je me suis assurée qu'il fasse moins de 4000 signes, espace compris...). Je vais donc le publier chez moi et vous enverrai un lien dans un deuxième temps!

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    1. Bonjour, merci de votre remarque. J'attend vos observations avec impatience.

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